Si on admet la supervénience physique de la conscience sur l'activité computationnelle du graphe booléen Macbeth, sommes-nous forcés d'admettre la supervénience de la conscience sur l'activité physique de Macbeth. Après tout, il y a une différence fondamentale entre Macbeth et Macbeth. Leurs activités physiques ne sont équivalentes, en présence de l'heureux rayon cosmique ou en présence de la projection du film, que pour une exécution particulière. La moindre pertubation externe rend le rayon cosmique ou la projection du film inopérant. On peut dire que Macbeth est contrefactuellement correct, en ce sens que Macbeth fonctionne pour toutes les exécutions possibles alors que ``Macbeth + le film" ne fonctionne correctement que pour une exécution particulière.
Ce qui est mis en doute ici est la proposition selon laquelle la conjonction du computationnalisme et de la supervénience physique entraîne la supervénience accidentelle active. Une telle objection met en doute de la même manière la proposition selon laquelle la conjonction du computationnalisme et de la supervénience physique entraîne la supervénience accidentelle passive. La machine dont on retire une pièce inutile pour un ensemble fini d'exécutions n'est pas non plus contrefactuellement correcte.
Si on reconnaît ces objections, on admet qu'il y aurait
supervénience physique de la conscience sur des processus
physiques non actualisés. Ceci est raisonnable, d'autant plus
qu'aujourd'hui nous savons que des résultats de mesure, en
mécanique quantique, peuvent effectivement dépendre
d'observations potentielles non actualisées et donc
dépendre de vérités contrefactuelles. Mais dans ce
cas, on ne peut plus parler de supervénience physique, qui, je
le rappelle, concerne nécessairement des token. On est
obligé de faire supervenir la conscience sur les activités
potentielles de la machine. On doit dès lors associer
la conscience à des types ou des collections d'activités
physiques
possibles. Mais alors, avec le computationnalisme, on
doit, dans ce cas, associer la conscience à des types
d'activités computationnelles possibles, donc à des
ensembles d'exécutions possibles de machines universelles,
mais ceci revient à remplacer la supervénience
physique par la supervénience computationnelle.
On réalise l'importance de la notion de ``contrefactuel" pour
toute notion de supervénience computationnelle. J'ai réalisé
l'importance du contrefactuel concernant la supervénience à la
lecture de l'article de Maudlin 1989.
En résumé, la conscience relative à un type d'état
computationnel d'une machine universelle supervient sur la collection des
extensions ``immédiates" possibles de ces états apparaissant dans
l'entièreté du déploiement universel. Ceci résulte à la
fois de l'argument du déployeur universel et du graphe filmé. Dans
la recherche prospective des phénoménologies de l'esprit et de la
matière, on tentera de capturer (modéliser) le ``possible" par
l'arithmétiquement consistent (voir aussi
[Goldblatt, 1978, Goldblatt, 1993]). Il s'agit d'une forme de ``darwinisme
arithmétique": les sondages sur les avis des machines vont
être restreints aux états des machines consistantes (survivantes aux
reconstitutions). On utilise ici explicitement l'aspect
indexical de notre hypothèse du mécanisme illustré au
chapitre précédent (voir aussi annexe D).