Next: Le computationnalisme est une
Up: Une formulation générale du
Previous: Une formulation générale du
L'ontologie, par définition, c'est ce qui est sensé décrire l'être, des
êtres, ce qui existe, la collection de ce qui existe. Elle recouvre
l'objet de l'éventuel engagement ontologique du philosophe. Elle
constitue la réalité fondamentale que sa doctrine admet comme
primitive. A cette occasion, le rasoir d'Occam (ou Ockham) est
fréquemment invoqué pour justifier un engagement ontologique
minimal. On utilise en effet le rasoir d'Occam pour satisfaire un principe
de parcimonie : les entités existantes, selon ce principe, ne doivent
pas être multipliées plus qu'il n'est nécessaire. Dans la
littérature, on rencontre différentes sortes d'interprétations
du rasoir d'Occam, pris dans un sens
élar- Les interprétations syntactiques
- On veut la plus petite (dans
différents sens) théorie possible. C'est, en général,
l'interprétation la moins intéressante. Une théorie minimale
(incompressible) est toujours difficile
à comprendre. Dans la pratique on utilise toujours des
présentations syntaxiquement redondantes des théories.
- L'interprétation sémantique
- Une première idée
consisterait
à avoir une théorie qui admet le moins de modèles possibles.
Cette idée est directement contrecarrée par les résultats de
limitation des formalismes dès qu'on a des théories assez riches.
Aujourd'hui la mode est plutôt aux théories ubiquistes, qui
admettent de nombreux modèles permettant l'interprétation des
théories dans des contextes très variés (groupes,
catégories, foncteurs, etc.).
Une meilleure idée pour
l'interprétation sémantique du rasoir d'Occam consiste plutôt
à avoir le moins d'objets possibles dans le modèle attendu d'une
théorie, du moins lorsque cette théorie est destinée à
décrire une ontologie.
- L'interprétation conceptuelle
- On veut
le moins d'hypothèses ad hoc possibles, ou de principes
philosophiques, dans la théorie ou dans la philosophie.
L'interprétation sémantique peut être considérée comme
une interprétation conceptuelle particulière.
définition Lorsque l'on rend
compte, dans un cadre philosophique donné à partir d'une
certaine ontologie , d'un phénomène
, sans engagement ontologique supplémentaire, je dirai qu'on
a construit une phénoménologie de à partir de
. Cette construction utilise implicitement l'interprétation
conceptuelle ou sémantique du rasoir d'Occam.
En philosophie de l'esprit, on distingue les monistes qui commettent
un engagement ontologique unique (portant sur l'esprit ou sur la
matière) des dualistes qui commettent un double engagement ontologique
(l'esprit et la matière).
L'expression ``problème du corps et de l'esprit" (The mind-body
problem) est elle-même une formulation dualiste du problème du
corps et de l'esprit. En fait, il y a autant de formulations du problème
du corps et de l'esprit qu'il y a de types de systèmes philosophiques.
Exemples:
- Pour le monisme matérialiste, le problème consiste
à construire une phénoménologie de l'esprit, ou d'une
phénoménologie de la relation esprit/matière, à
partir d'une ontologie matérielle ;
- Pour le monisme idéaliste, le problème consiste
à construire une phénoménologie de la matière, ou d'une
phénoménologie de la relation esprit/matière, à
partir d'une ontologie ou d'une ``vérité" spirituelle ;
- Pour le dualiste, le problème consiste à construire une
``phénoménologie" de l'interaction entre l'esprit et la
matière. Le mot phénoménologie doit
être pris ici dans un sens nécessairement différent et a priori
difficile à préciser : c'est la faiblesse de base du dualisme. En
effet, si l'on pense qu'il existe une interaction entre l'esprit et la
matière, on voit mal comment échapper à la disjonction suivante
: ou bien l'esprit est une forme ou une modalité de matière, ou
bien la matière est une forme ou une modalité de l'esprit. En
essayant de rendre le dualisme intelligible on tombe à coup sûr
dans l'un ou l'autre des monismes décrits plus haut, ou l'on tombe dans
l'épiphénoménalisme. Celui-ci est juste un nom pour cesser de
chercher à comprendre aussi bien l'esprit que la matière.
Au lieu de construire une phénoménologie, certains philosophes
préfèrent argumenter contre l'idée que cette
phénoménologie est nécessaire. Le matérialisme
éliminativiste, par exemple (Churchland 1986) considère le
discours du psychologue traditionnel, appelé aussi la psychologie
de grand-mère, comme vide de sens. Je tiendrai les tentatives
explicites d'élimination (phénoménologique) de ce genre comme
des
élaborations phénoménologiques particulières. Si
l'élimination est implicite et non accompagnée de justifications,
alors on est, à nouveau, en présence des positions béhavioristes
ou positivistes, positions qui sont stériles (par construction) en ce
qui concernent les problèmes durs de la philosophie de l'esprit.
De nombreuses confusions en philosophie des sciences
proviennent du fait qu'on s'attache à préserver
simultanément le mécanisme et le matérialisme, par
crainte de l'idéalisme, lui-même confondu avec le
solipsisme (l'idéalisme subjectif).
(Dans le rapport technique [Marchal, 1995] je
traite deux exemples de confusions de ce genre, chez Bell 1987,
et dans le dialogue de Changeux
et Connes 1989).
Avec ces termes on peut exprimer le résultat principal de notre travail
par
où l'ontologie idéaliste est la vérité
arithmétique, et où le problème du corps et de l'esprit est
transformé en la recherche d'une phénoménologie de
l'esprit et de la matière.
Next: Le computationnalisme est une
Up: Une formulation générale du
Previous: Une formulation générale du
Bruno Marchal
Thu Apr 1 00:14:24 CEST 1999